Fête des mères

Fête des Mères Félix RégameyDès 1941, l’objectif poursuivi par le régime de Vichy est d’effacer toute marque d’autonomie des femmes qui, en cette période de guerre, ont l’occasion de prendre leurs premières responsabilités : en l’absence des hommes, elles prennent les rênes des exploitations agricoles, s’occupent du ravitaillement, sont sur les routes de l’exode.
Vichy se caractérise par un antiféminisme extrême, sous couvert d’une politique de la famille : généralisation de l’allocation de mère au foyer (loi du 29 mars 1941) ; durcissement des conditions de divorce (loi du 2 avril 1941) ; l’abandon du foyer devenant une faute pénale et non plus civile (loi du 23 juillet 1942) ; interdiction d’embauche des femmes mariées (loi du 11 octobre 1940) ; qualification de l’avortement comme « crime contre la sûreté de l’État » (loi du 15 février 1942), ou encore possibilité pour le ministère public d’engager des poursuites pour adultère à l’encontre des épouses des prisonniers de guerre (loi du 23 décembre 1942). L’ensemble de ces mesures participe à l’exclusion des femmes de la sphère publique et à leur (ré)installation dans un foyer domestique sous contrôle.
L’idéologie de Vichy veut montrer une image rassurante, éternelle et maternelle qui correspond à l’attente d’une grande partie de la population. Exemple de message aux maris : « Vos dépenses seront moins lourdes avec la femme au foyer » (affiche de 1942). Exemple de message à la mère : « Mamans, la femme coquette, sans enfant n’a pas de place dans la cité, c’est une inutile. La mère de famille y a son rôle parce qu’elle est compétente, c’est sur ses genoux que se forme ce qu’il y a de plus excellent dans le monde, un honnête homme. »
Cet idéal du modèle maternel promu par Vichy s’est exprimé par l’officialisation en 1941 de la fête des mères pour toutes et pas seulement pour les mères de familles nombreuses. Elle est une des manifestations les plus significatives de la mobilisation de l’idéal maternel qui, à l’époque, répondait à l’inquiétude démographique et rencontrait l’assentiment d’une grande partie de la population.
Vichy multiplie les lois pour réduire l’activité des femmes, responsable de la dénatalité. Le manque d’enfants de sexe masculin (futurs hommes-soldats) est présenté comme l’expression la plus forte du déclin de la France et les femmes sont considérées comme coupables.
Les femmes allaitantes ont droit à un quart de lait supplémentaire par jour, donc les femmes allaitent les bébés le plus longtemps possible (cf. Les femmes et la Résistance, Laurence Thibault, Documentation française, 2006). Une fois la démocratie rétablie, Vincent Auriol officialise définitivement la fête des mères dans la loi du 24 mai 1950. La mère se voit donc récompensée chaque année pour sa fécondité, avec soutien financier du ministère de la Santé jusqu’en 2004, où c’est le ministère chargé de la famille qui en hérite…
Ne pas vouloir d’enfant reste aujourd’hui largement considéré comme une sorte d’anomalie, mais chaque dernier dimanche de mai, nous célébrons mielleusement une fête pétainiste. Ne regardons plus jamais les colliers de nouilles de la même façon.

Illustration : Affiche de Félix Régamey pour la fête des Mères, 28 mai 1906 – Wikipedia – Domaine public


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