Ève

Tentation, pomme, péché, soumission et douleur de l’enfantement. Voilà parmi les associations les plus souvent invoquées à la lecture du nom de celle qui fut, d’après le livre de la Genèse, la mère de l’humanité. Pourtant, il est intéressant de préciser que, si dans la tradition juive puis chrétienne, Ève est tenue responsable de l’expulsion d’Adam et par là-même de la sienne, du jardin d’Éden, le Coran quant à lui les tient pour solidairement responsables. Tentatrice et tenté dans le même sac !
Il faut quand même bien dire que ce lâche d’Adam comptait bien que seule Ève serait punie ! Il n’était qu’une pauvre victime, bien incapable de maîtriser ses pulsions devant tant de force de persuasion. On notera que c’est bien un des seuls contextes dans lequel l’homme invoque la faiblesse : « Tout est de sa faute ! Elle a fait étalage de tout son potentiel de séduction. Je plaide non coupable votre Honneur ! » Toute ressemblance avec des situations vécues et revécues par la suite est loin d’être fortuite. Ève, un véritable péché sur pattes.
Sacrée Ève ! Par sa faute, le pauvre Adam a toujours la pomme coincée en travers de la gorge. Il faut dire qu’il était tranquille dans son jardin d’Éden, à l’ombre de son arbre de la connaissance, et il a fallu que cette Ève veuille en goûter le fruit ! Quelle idée ! Et franchement, étant données les conséquences de cet acte inconsidéré autant qu’inutile, il serait de bon ton de veiller à ce que pareille chose ne se reproduise plus. Adam peut se rassurer, la pauvre, occupée à enfanter l’humanité, n’a plus guère eu l’envie ni le temps.
Et pourtant, depuis le commencement, Ève veille, résignée, courageuse mais convaincue du caractère expiatoire de sa condition. Des millénaires de culpabilité sur les épaules, l’injonction divine de la soumission en guise de joug. La pomme quant à elle s’en sort finalement assez bien : après avoir assisté Newton dans ce qui fut une des découvertes les plus fondamentales de la science, elle est désormais le synonyme de réussite planétaire, la bouchée d’Ève en moins… histoire de ne pas oublier quand même…